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Rameau FOBY

  • mamakos-creations
  • il y a 1 jour
  • 9 min de lecture

« En mai, tonte à l’arrêt. »

« En mai, ne taille pas tes haies. »

Et ça tombe bien, puisque le défi généalogique des #RameauxCachés nous incite à favoriser la pousse des petites ramifications au bout, tout au bout des branches.


Après avoir fait grandir mon rameau CAMPLO en avril dernier, je choisi de cultiver mon rameau FOBY.

Nous sommes toujours sur ma branche patronymique, celle des LAFABRIÉ :


Arbres circulaires ascendants d'Étienne LAFABRIÉ (sosa 128) et de Dauphine BOISSIÈRE (sosa 515)


Nous sommes toujours dans les Cévennes, dans la paroisse de Bez :


L'église Saint-Martin de Bez, où commence cette histoire. (Google Maps)




Où l'on commence par une noce


Nous sommes le dimanche 22 octobre 1651. En l'église Saint-Martin du village de Bez (dans le Gard), Dauphine FOBYE épouse Jean LASALLE et, pour notre plus grand bonheur (qui est certainement moindre que celui des jeunes marié·es, mais tout de même !), monsieur le prêtre et vicaire André LAGALIE n'est pas avare d'encre et de papier :

Acte de mariage de Jean LASALLE et Dauphine FOBY
Extrait de l'acte de mariage de Jean LASALLE et Dauphine FOBY, 1651, Bez. AD 30, cote GG04/GG08, vue 13/262
« … ay interroge Jean de Lasalle fils à autre et à feüe Dauphine Peyrote du mas de Louse paroisse dudit Bez, et Dauphine Fobye fille à feu Anthoine Foby et a Margueritte Martine maries du mas del Quintanel parroisse de Blandas et apres avoir recu leur mutuel consentement les ay solemnelement conioints en marige par parolle de present et en presence de tesmoins cognus et dignes de foy qui sont Anthoine de Lasalle, Pierre Musel de Lousou et Pierre Quatrefages de mas de Lousac… »

L'acte renseigne la filiation complète et précise que Dauphine FOBYE est native de la paroisse de Blandas (Gard).

Comme il est de coutume à cette époque et dans cette région, les noms de famille sont accordés au féminin pour les femmes, ce qui n'est pas sans me plaire [1]. Et que diraient les rageux de l’Académie de ces tournures « fautives » comme « la fille à » ?

Mais revenons à nos brebis – car nous en croiserons certainement au cours de notre enquête, vu le lieu où elle se déroule.


Nous voici donc en présence des protagonistes : Dauphine FOBYE et son père Antoine FOBY, décédé avant 1651. Ils sont, lorsque cette enquête débute, les deux seul·es représentant·es de la famille FOBY dans mon arbre.


Lignée de mon sosa 2 à mon sosa 4126
La lignée depuis mon père (sosa 2) à Antoine FOBY (sosa 4126, 14e génération)



Où l'on craint de ne jamais pouvoir démarrer l'enquête


Malheureusement, en ce qui concerne la paroisse de Blandas – dont sont donc originaires Antoine et sa fille Dauphine – les registres paroissiaux ne sont conservés qu’à partir de 1730. Ce n’est donc pas de ce côté-ci que je pourrai trouver de nouvelles informations.

Les archives notariales ne sont pas accessibles en ligne.

Nous allons pour l'heure de déception en déception, et notre rameau FOBY paraît voué à rester rachitique...


C'est sans compter sur l'entraide généalogique et la mise en ligne sur Geneanet des inventaires des notariats d'Aulas et d'Alzon (Gard), qui sont les deux « villes » entourant les paroisses de Bez et de Blandas [2].

Me voici donc en train de parcourir ces inventaires ma foi plutôt bien détaillés [3].

J'en sais désormais beaucoup plus sur mes ancêtres FOBY et, surtout, de frêle brindille à deux feuilles, mon rameau est devenu une belle branche – remplie de nouvelles ramifications.


Arbre de Dauphine FOBY
Arbre de Dauphine FOBYE (sosa 2063). Généatique, 2025



Où l'on trouve mention d'un contrat de mariage de 1583


En 1583, nous sommes sous le règne d'Henri III. Le royaume de France est secoué par les guerres de religion et les Cévennes, haut-lieu du protestantisme, ne sont pas épargnées.

Toutefois, mes ancêtres FOBY sont restés fidèles à la religion catholique, ainsi qu'en attestent leurs testaments.


Le plus ancien acte notarié dont j'ai trace concernant les FOBY est le contrat de mariage entre Guillaume FOBY et Madeleine REDOUSSAS, contrat passé devant maître Urbain Sarran, notaire d'Aumessas, le dimanche 4 décembre 1583 [4] :

Contrat de mariage de 1583
Inventaire du notariat d'Alzon, AD 30 cote 2-E-69/17. (Source Geneanet)

Les FOBY sont une famille importante à Blandas, et notamment au mas de Quintanel. Au point qu'ils seront désignés « baille pour le roi » sur plusieurs générations – au moins entre 1598 et 1660.

Cette charge, ajoutée au fait que nos ancêtres languedociens passaient beaucoup de temps chez le notaire (testaments, contrats de mariage, mais aussi quittances et donations, ventes et locations), explique que je trouve tant de mentions des membres de la famille FOBY dans les inventaires de notaires.




Où l'on en apprend un peu plus sur le baille et ses fonctions


Le baille est choisi par le seigneur, « qui choisit l’homme le plus apte, le plus fidèle à le représenter et à défendre ses intérêts vis-à-vis de la communauté [5] ».

« Cette commission a une limite dans le temps puisqu’elle est renouvelable à chaque nouveau seigneur. Elle s’achève avec le décès ou la démission du détenteur [6]. »

La fonction de baille place la famille FOBY dans une situation d’honorabilité sociale. Le baille, arborant son « bâton de justice » préside les assemblées d’habitants [7]. En outre, « chargé de la police locale, le baille pouvait exercer une justice sommaire et infliger des amendes allant jusqu’à dix livres [8] ».

Mariage LASALLE-MARTIN, 1649
Mariage de Jean LASALLE et Marguerite MARTIN, 1649, paroisse Saint-Martin de Bez. AD 30 cote GG04-GG08
« [Mariage entre] Jean Lasalle fils à feu autre et à feüe Jeanne Quintanelle du mas de Lousou de cette paroisse et Margueritte Martinne vefüe de feu Anthoine Fobu baille du Quintanel paroisse du dusdit Blandas »

Dans ma branche FOBY, je compte pour l'heure trois bailles : Antoine FOBY (vraisembla-blement le frère de mon ancêtre Guillaume FOBY), puis Antoine FOBY (le fils de Guillaume, et cité dans l'acte ci-dessus) – auquel succèdera son frère David FOBY après sa mort en 1647/1648.




Où l'on collecte de précieuses informations dans les dépouillements de contrats de mariage


Je n’ai pas trouvé trace du contrat de mariage entre Antoine FOBY et Marguerite MARTINE.

En revanche, j’ai quelques informations sur les contrats de mariage de certain·es de ses frères et sœurs :

  • contrat de mariage entre Jean QUINTANEL de Belfort (paroisse de Blandas) et Louise FOBIES, le mardi 14 mai 1613 : Louise FOBIES est dotée de 160 francs, deux robes, cinq linceuls et autres effets. Le contrat est passé au mas de Quintanel, devant maître Guillaume GOUTTEZ [9] ;

  • contrat de mariage entre DAVID FOBY du mas de Quintanel et Antoinette RAYMONDE du mas de Gressentis (paroisse de Sauclières, Aveyron) le jeudi 29 juin 1623. La mariée est dotée de 330 livres, dix linceuls toile de maison, quatre robes dont deux cadis, deux nappes, six serviettes, une caisse bois châtaignier [10] ;

  • contrat de mariage entre Anne FOBYE et Jean BARRAL, marchand de la ville d’Aulas le jeudi 12 août 1632. Anne FOBYE se présente en femme libre, veuve en premières noces d’Antoine QUATREFAGES, et elle « se constitue dot sur tous ses biens [11] ».


En cette première moitié du XVIIe siècle, le roi de France est Louis XIII ; le cardinal de Richelieu devient le principal ministre d'État ; la guerre de Trente Ans fait rage.

Le bruit du monde doit cependant sembler fort lointain à mes ancêtres cévenols, certainement plus soucieux de faire fructifier leurs biens et s'assurer de bonnes récoltes alors que l'Europe connaît les années parmi les plus froides du petit âge glaciaire [12].




Où un testament nous en apprend davantage encore sur la famille


Antoine FOBY teste le samedi 2 décembre 1645, « détenu malade ».

Il lègue à Antoinette FOBIE sa fille « 400 livres, trois robes, quatre brebis, un coffre noyer ».

Son héritière est sa femme Marguerite MARTINE, « à charge de rendre à Dauphine son autre fille quand sera l'âge de 15-16 ans [13] ».

Antoine survit finalement à cette maladie.


Il teste une seconde fois le vendredi 4 octobre 1647 [14] :

testament de Mre Antoine FOBY baille du mas de Quintanel paroisse de Blandas, considérant fragilité humaine détenu de maladie à Antoinette Fobye sa fille 400 livres, deux robes garnies, quatre brebis, une flessade laine de Montpellier de valeur 10 livres, deux linceuls, un coffre bois noier fermée le tout payables 1/2 et accoutrements à noces et restant dans l'an veut que Marguerite Martine sa femme bien aimée soit maitresse et usufruitière de ses biens à charge de entretenir ses enfants sans prestation de relicat et prohibe faction d'inventaire car lui fait entièrement confiance, mais lui donne licence de vendre cas de necessité pour y subvenir mais si ladite Martin vient à convoller devra remettre lesd[ites] choses et puis donne pour augmentation et aider son second mariage 40 livres et veut que soit contente héritière Dauphine Fobye son autre fille ainée, laquelle venant à décéder en pupilarité lui substitue Antoinette signe ledit A. FOBY baille

Je trouve particulièrement touchant les mots de tendresse qui transparaissent à la lecture de cet extrait du testament.

On remarque également le pouvoir qui est accordé aux femmes héritières, véritables gestionnaires des biens familiaux. Même si elles sont assistées de leurs fils, beaux-frères ou oncles, elles agissent en leur nom propre.


Antoine FOBY décède peu de temps après ce second testament ; la charge de baille revient à son frère David.




Où deux familles importantes s'allient


En 1649, la fille aîné d'Antoine FOBY, Dauphine, et sa veuve Marguerite MARTINE s'allient à la famille LASALLE. Les LASALLE sont à Laussou (paroisse de Bez) ce que les FOBY sont au Quintanel.


Dauphine FOBYE épouse Jean LASALLE – fils de Jean LASALLE qui, de son côté, épouse Marguerite MARTINE.

Les contrats de mariage sont passés conjointement le mardi 17 août 1649.

Dauphine et Marguerite s'installent chez les LASALLE.


Le compoix de Bez de 1642 renseigne sur les possessions de la famille – et je peux imaginer que les biens de la famille FOBY étaient du même ordre.


Extraits du compoix de Bez, 1642. AD 30, C-1642, Bez-et-Esparon


Parmi les biens de Jean LASALLE père, dit La Parro : sa maison d'habitation au lieu-dit Laussou, comprenant une basse cour et un four cazal, une canabière, des arbres fruitiers, un noyer ; un champ appelé la Parro – qui donne son surnom à la famille ; une maison à deux étages en indivision avec son fils Antoine ; plusieurs vignes ; plusieurs oliveraies ; plusieurs châtaigneraies [15].




Où l'on synthétise les informations recueillies


Après mon enquête, j'ai finalement glané d'importantes informations sur le quotidien de mes ancêtres FOBY.

I·Els appartenaient à une importante famille de la région, propriétaires terriens et laboureurs, dont plusieurs membres ont eu la charge de « baille pour le roi ».

I·Els cultivaient le chanvre (dans les canabières) et la vigne, entretenaient des oliveraies et des châtaigneraies. Peut-être le fruit de leur récolte était-il vendu sur le marché du Vigan, qui se tenait le samedi.

Les FOBY, par le mariage, s'associèrent à d'autres familles puissantes des environs : les LASALLE à Bez, ou les BARRAL à Aulas.

Mon ancêtre Antoine n'a eu que deux filles, et son nom, dans mon arbre, s'éteindra avec elles.

Les femmes, gestionnaires de leurs biens lorsqu'elles héritent du père ou du mari, ont à cœur de transmettre leur héritage en bonne intelligence.


Dauphine FOBYE teste le mercredi 26 mai 1694 ; elle est alors âgée d'environ 60 ans et organise sa succession : 50 livres à cell·eux de ses enfants qui ne sont pas marié·es, la confirmation de leur dot à ses filles mariées.

Elle fait de son mari Jean LASALLE sont héritier « pour rendre en fin de ses jours comme bon lui semblera [16] ».


Delphine FOBYE décède le samedi 2 décembre 1713, âgée d'environ 80 ans, et est inhumée le lendemain dans le cimetière de Bez.

Sépulture de Dauphine FOBYE
Sépulture de Dauphine FOBYE, Bez, 1713. AD 30, cote GG10-GG11
L'an que dessus et le troisieme decembre a etté enterre Dauphine Fobi fame de feu Jean Lasale du mas de Lausou paroisse dud[it] Bes, agee d'environ quatre vingts ans, morte le jour precedant. Pres[ents] François Reboul et François Ricard.

PODCAST


J'ai entre autres écouté pendant la rédaction de cet article l'émission « Un coq dans son village, portrait d'un laboureur du grand Siècle » (série Au village, une histoire politique, épisode 2. Le cours de l'histoire, présenté par Xavier Mauduit sur France Culture).


NOTES


[1] Je choisis dans cet article d'adopter la féminisation des noms de famille, en vigueur en Languedoc sous l'Ancien Régime.

[2] Ou, plus précisément les hameaux de Laussou et du Quintanel, distants de seulement 4 km à vol d'oiseau.

[3] Et me retrouve à présent avec une longue liste d’actes notariés à aller consulter aux archives départementales du Gard.

[4] Cette date résonne particulièrement : songez que je suis née très exactement 400 ans plus tard, le dimanche 4 décembre 1983 !

[5] Marc JUSTAFRÉ,« L’exercice héréditaire des fonctions seigneuriale et municipale dans une communauté du Vallespir sous l’Ancien Régime », in Pouvoirs de la famille, familles de pouvoir, sous la dir. de Michel BERTRAND, Presses universitaires du Midi, 2005, p. 127-139, accessible à l'adresse https://books.openedition.org/pumi/39581?lang=fr#anchor-toc-1-3 [consulté le 1er mai 2025].

[6] Idem.

[7] Ainsi que l’écrit Michel BRUNET dans son article « Conflits et complicités : baillis seigneuriaux et consuls des communautés en Roussillon au xviiie siècle », in Les justices de village : administration et justice locales de la fin du Moyen Âge à la Révolution, sous la dir. de F. Brizay, A. Follain et V. Sarrazin, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2015 : « ce rôle est essentiellement honorifique et ne comporte guère de pouvoir réel, sauf à essayer de ramener l’ordre lors des séances particulièrement agitées ». Article accessible à l'adresse https://books.openedition.org/pur/19020?lang=fr#anchor-toc-1-6 [consulté le 1er mai 2025].

[8] Idem.

[9] AD30, cote 2-E-9/7 – Guillaume Gouttez.

[10] AD30, cote 2-E-9/14 – Guillaume Gouttez.

[11] AD30, cote 2-E-9/19 – Guillaume Gouttez.

[12] « Chronologie climatique du dernier millénaire en Europe », Les archives de Francescas, https://www.francescas.info/archives/macro_environnement/climat.htm [consulté le 1er mai 2025].

[13] AD 30, cote 2-E-78/20 – César Perret.

[14] AD 30, cote 2-E-78/22 – César Perret.

[15] Oliviers et châtaigniers résisteront très mal aux terribles gelées de l'hiver 1708-1709.

[16] AD30, cote 2-E-9/206 – Claude Malien.

2 commentaires

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Invité
il y a 15 heures

Un petit air du sud, de précieux documents et voilà des rameaux mis en valeur

Fanny-Nésida

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mamakos-creations
il y a 13 heures
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Merci, Fanny-Nésida ! 😊

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