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« Zeer geliefde vader broeders en zusters » (3)

« Très chers père frères et sœurs » : Lettres au Vieux Pays


Nous avons laissé la famille BAKELAAR en 1856 dans le New Jersey.

Parmi les quatre enfants de Dirk BAKELAAR qui ont atteint l'âge adulte, trois sont désormais installés aux États-Unis.

Sur l'arbre de descendance ci-dessous, les personnes dont le cartel est grisé sont décédées, celles en vert sont nées aux Pays-Bas et ont émigré aux États-Unis. Le premier descendant (documenté) de Dirk qui est né aux États-Unis est le petit Cornelis, né en 1854 (en vert pomme sur l'arbre).


Arbre de descendance de Dirk BAKELAAR
Arbre de descendance de Dirk BAKELAAR. En vert, celles et ceux qui sont installé·es aux USA en 1856. Généatique, 2024

En 1861, c'est la troisième génération, devenue jeune adulte, qui commence à traverser l'océan, en la personne de Klaartje MASTENBROEK, la fille aînée de Aagtje BAKELAAR.


De Klaartje MASTENBROEK, Paterson, New Jersey

À sa mère Aagtje BAKELAAR, Ouddorp

Septembre 1861

Ma très chère mère, cher beau-père, chers frère et sœurs, C’est avec une grande joie que je peux vous annoncer que je suis bien arrivée à Paterson, New Jersey. J’espère que vous allez bien aussi. Mes oncles et tantes et mes cousins et cousines vont tous bien également. Oncle Hendrik et tante Lijntje ont quatre filles, qui sont Klaartje treize ans, Aagtje onze ans, Cornelia sept ans, et Neeltje quatre ans. Mais on les appelle Henry, Lena, Clara, Agnes et Nellie. Cornelia est Cornelia en anglais, alors on l’appelle Cornelia. Les filles parlent toutes parfaitement anglais, elles vont peut-être m’aider à le parler rapidement. Je connais quelques mots, mais ce n’est pas évident. Tante Adriaantje et oncle Jacob vont bien aussi. Cornelis et Willem ne sont là que depuis deux ans, mais ils parlent déjà très bien anglais. Ils ont beaucoup grandi en deux ans ! Oncle Jacob a le projet d’acheter une concession dans le Michigan, mais il faut d’abord économiser pour cela. Je me plais bien pour le moment à Paterson. C’est une grande ville. Tellement grande, vous ne pouvez pas imaginer ! Il faut plusieurs heures pour la traverser ! Mais il y aussi beaucoup de gens connus dans le quartier. Beaucoup de Flakkeers sont ici. Par exemple, il y a le cousin Cornelis Bakelaar. Et d’autres familles de Ouddorp, comme les Venneman et les Pikaard. C’est agréable de retrouver des têtes connues. Je peux trouver facilement du travail, ici. Les usines de soie emploient beaucoup de monde. Ça me permet de payer le loyer à tante Adriaantje. C’est chez eux que je vis pour le moment, parce que c’est chez eux qu’il y a le plus de place. Et c’est très bien meublé. Mieux meublé que dans la plus belle maison de Ouddorp. La vie est moins chère ici, et en travaillant, on peut facilement gagner sa vie. C’est un pays parfait pour les Hollandais qui n’ont pas peur de travailler dur. Ici, on ne mange pas comme en Hollande. Ou plutôt, la nourriture est la même, mais les proportions sont différentes. « Ici, on mange surtout de la viande et de la sauce, et les pommes de terre ne sont qu’un accompagnement. Du coup, deux ou trois pommes de terre, ça suffit largement[1]. » Frère Jan, j’espère que tu considèreras un peu plus la possibilité de venir aux États-Unis, maintenant que je te dis ce que je vois en vrai, sans enjoliver : ici, il y a du travail pour tout le monde. Les journées de travail sont moins dures qu’en Hollande, on gagne mieux sa vie, et les produits courants sont généralement moins chers. Je vous souhaite d’être en bonne santé. Écrivez-moi vite. Votre dévouée fille et sœur, Klaartje MASTENBROEK
PS : Cher neveu Jan, je t’enjoins de nous rejoindre ici à Paterson. Les journées de travail sont de 7 heures du matin à 17 heures le soir, avec une coupure de 1 heure à midi. Et le travail n’est pas épuisant. Je gagne quatre dollars par semaine. Lijntje gagne un peu d’argent en faisant des lessives. C’est ce que font les femmes, ici. Notre aînée Neeltje, treize ans, a commencé à travailler aussi. Elle gagne un dollar par semaine. Le loyer est de deux dollars et cinquante cents par mois. Je te laisse faire le calcul. La nourriture n’est pas chère, sauf le pain. C’est pour ça que les femmes ici font elles-mêmes leur pain. C’est aussi ce que fait Lijntje. Cher neveu, il y a du travail pour tout le monde ici. Et un avenir meilleur que dans le vieux pays. Dis aussi à ta mère, ma chère sœur Aagtje, qu’elle peut aussi nous rejoindre ici, avec Jacob et les enfants. Tous ses frère et sœurs sont aux États-Unis, maintenant. Ton oncle, Hendrik BAKELAAR
Vue de Paterson, New Jersey, 1865. NewVue de Paterson, New Jersey, 1865
Vue de Paterson, New Jersey, 1865. New York Public Library


Après Klaartje en 1861, puis Ariaantje en 1864, c'est au tour de l'aîné de Aagtje BAKELAAR, Jan MASTENBROEK, de céder à l'appel de l'Amérique. Il arrive à New York en janvier 1866, avec sa femme Neeltje van HOVEN et leurs filles Aagje (°1863) et Neeltje (°1864).


De Jan MASTENBROEK, New York

À sa mère Aagtje BAKELAAR, Ouddorp

Janvier 1866

Très chère mère, cher père, chères sœurs et frère[2], Nous sommes bien arrivés à New York. Voyager avec deux petits enfants n’est pas de tout repos. Mais nos petites Aagje et Neeltje vont bien. Nous ne restons pas à New York, mais nous continuons vers le Michigan. Il y a beaucoup d’opportunités là-bas. Nous avons eu la joie de revoir notre chère sœur Ariaantje. Elle va bien et fréquente Leendert Breen, le fils de Eeuwit[3]. Klaartje va bien aussi. Nous avons eu la joie de faire la connaissance de son mari Willem Venneman. Leur petit fils Philip a maintenant un an et demi, et, si Dieu le veut, Klaartje aura bientôt un deuxième enfant. Elle est déjà bien grosse. Dès que nous sommes arrivés dans le Michigan, nous vous enverrons notre adresse. Nous espérons que vous allez bien. Vos enfants dévoués, J. Mastenbroek



De Jan MASTENBROEK, Paris, Michigan

À sa mère Aagtje BAKELAAR, Ouddorp

Décembre 1869

Très chère mère, Merci pour votre dernière lettre. Nous sommes heureux de savoir que vous allez tous bien. Grâce à Dieux, nous allons tous bien nous aussi. Notre installation dans le Michigan est un grand succès. Nous avons pu acheter de la terre. Nous sommes heureux de vous annoncer que Maartje a mis au monde un beau bébé. Nous l’avons appelé Klaas [anglicisé en Nicholas], en l’honneur du père de Maartje. Nos autres enfants vont bien. Agnes a maintenant six ans, Neeltje cinq ans, et Leendert [anglicisé en Leonard] va avoir trois ans. Notre situation est bien meilleure ici qu’en Hollande. Nous vous recommandons vivement de nous rejoindre. Il y a beaucoup de place ici, et la terre n’est pas chère. Nous engageons aussi nos sœurs Klaartje et Adriaantje à nous rejoindre ici dans le Michigan. Il y a plus d’opportunités ici qu’à Paterson. Savez-vous, mère, si Jacomijntje[4] habite encore avec Adriaantje et Leendert ? Dans sa dernière lettre, Adriaantje rapportait qu’elle était restée très fatiguée depuis la naissance de la petite Agnes, et que Jacomijntje lui était d’une grande aide[5]. Nous avons reçu des nouvelles de sœur Klaartje et de Willem. Ils sont inquiets pour le petit Jan[6]. Il a maintenant un an et demi, mais il reste très petit et faible. Je pense qu’il se porterait mieux ici, à Paris. Ici, l’air est bon. [Longues considérations sur les prix des denrées, les salaires et les connaissances communes] Ici, il y a une grande fête pour le moment de Noël. Les Américains ne fêtent pas du tout saint Nicolas, et il n’y a pas de grande fête pour le nouvel an. Toutes les festivités ont lieu à Noël. Et aussi pour le jour de Thanksgiving, en novembre. Nous espérons que, par la grâce de Dieu, la nouvelle année vous sera bonne. Vos enfants dévoués, J. Mastenbroek

Carte de Grand Rapids, Michigan, 1868
Carte de Grand Rapids, Michigan, 1868. Library of Congress

En 1869, seule la fille aînée de Dirk BAKELAAR, Aagje, vit encore aux Pays-Bas, avec son second mari Jacob de VOGEL et leurs deux enfants en vie, Neeltje et Jacob (junior) :


Arbre de descendance de Dirk BAKELAA
Arbre de descendance de Dirk BAKELAAR. En vert, celles et ceux qui sont installé·es aux USA en 1870. Génétaique, 2024

Jacob de VOGEL (junior) émigre à son tour en 1887. À la mort de son mari Jacob de VOGEL en 1888, Aagje n'a désormais plus aucune famille proche aux Pays-Bas. Plus rien ne la retient, les conditions de vie sont certainement très difficiles, et elle se résout à rejoindre son fils.

À partir de 1889, il n'y a donc plus aucun descendant de Dirk BAKELAAR aux Pays-Bas.


Arbre de descendance de Dirk BAKELAAR
Arbre de descendance de Dirk BAKELAAR. En vert, celles et ceux qui sont installé·es aux USA en 1888. Généatique, 2024

 

NOTES

[1] Extrait d’une lettre de Jan Wonnink à Berend Peterkamp datée de juillet 1871. Voir Dutch American Voices, p. 248.

[2] En 1866, restent aux Pays-Bas : la mère des enfants MASTENBROEK, Aagtje BAKELAAR, son second époux Jacob de VOGEL, ainsi qu’une sœur, Jacomijntje MASTENBROEK et deux demi-sœur et demi-frère, Neeltje et Jacob de VOGEL.

[3] Adriaantje MASTENBROEK épouse Leendert BREEN le 8 novembre 1866 à Paterson. Leendert BREEN, fils de Eeuwit et de Klaartje van der WENDE, né en 1844 à Ouddorp, a émigré aux États-Unis avec sa famille en 1854.

[4] Jacomijntje MASTENBROEK est arrivée aux États-Unis au printemps 1868.

[5] Adriaantje « Ida » MASTENBROEK et Leendert « Leonard » BREEN ont déjà deux enfants, Edward né en 1867 et Agnes née en octobre 1868.

[6] Jan [John] VENNEMAN, le troisième fils de Klaartje MASTENBROEK et Willem VENNEMAN, meurt à Paterson en juillet 1870.

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